Quand on parle de jeux rétros, il y a un fait qui revient souvent concernant les anciennes consoles : les jeux de la zone PAL (l’Europe globalement) tournent en 50Hz, et les jeux NTSC (principalement les pays américains et le Japon) en 60Hz. Dans ce dossier, je vais essayer d’expliquer simplement l’impact que cela peut avoir sur nos jeux, et de déterminer si dans votre cas il vaut mieux se tourner vers une collection de jeux PAL ou NTSC.

Un petit point culture sur les fréquences

Une fréquence est le nombre de fois qu’un phénomène se répète par unité de temps. Lorsque la fréquence est mesurée en Hertz (Hz), l’unité de temps est la seconde. Une fréquence de 60Hz signifie donc que l’événement se répète 60 fois par seconde. Il se trouve que le standard NTSC a été établi pour les zones où les courants sortait des prises électrique avec une fréquence de 60Hz, tandis que le format PAL pour un courant 50Hz. Il existe maintenant des techniques pour avoir des taux de rafraîchissement plus élevés, mais à l’époque, c’était beaucoup plus simple ainsi. Ce ne sont donc pas les constructeurs de console qui ont volontairement décidé de brider nos machines. Ils se sont simplement conformés aux caractéristiques techniques de nos téléviseurs qui avait un taux de rafraîchissement de 50Hz, calqué sur la fréquence du courant qui sort de nos prises électriques.

Il est d’ailleurs important de noter que les Hz mesurent la fréquence de rafraîchissement de l’image, c’est à dire le nombre de fois par seconde que l’image se met à jour sur l’écran. Cela n’est pas directement lié au nombre d’image par seconde (les fameuses FPS, Frames Per Second) ! En effet, si votre console, ou votre ordinateur, envoie 3 images par seconde, votre écran lui se rafraîchira toujours 60 fois pendant cette même seconde. À l’inverse, si votre machine envoie 15000 FPS, l’écran lui n’en affichera que 60. Par contre, ce n’est pas parce que l’image n’est pas affichée qu’elle n’a jamais existé. Elle a bien été calculée par la machine, et vos actions ont bien été prises en compte. C’est pour cette raison que les grands joueurs de jeux comme Counter Strike ont besoin d’avoir un grand nombre de FPS pour être certain que tout ce qu’ils font est bien pris en compte par le jeu.

Cette parenthèse étant terminée, détaillons en quoi consiste les 2 standards que sont le NTSC et le PAL.

Le standard NTSC :

Le NTSC (pour National Television System Comitee) est un standard de codage analogique pour la vidéo en couleur. Il a commencé à être vraiment utilisé pour la télévision aux États-Unis d’Amérique en 1953, puis qui s’est exporté vers d’autres pays (Canada, Japon, etc…). C’est un format d’image couleur 4:3 sur 525 lignes, et qui fonctionne donc en 60Hz. Cependant, 8% de la bande est utilisée pour régler la synchronisation entre le récepteur et l’émetteur ce qui fait donc qu’on ne voit qu’une image de 640 colonnes par 480 lignes (ou une résolution de 640×480 si vous préférez). Cette synchronisation est nécessaire pour que les lignes apparaissent bien à leur place (et cela vous donnera des migraines si vous essayer d’utiliser un upscaler pour vos TV Full HD). L’image est affichée en 2 fois : d’abord on affiche les lignes paires, puis les lignes impaires. Ce mode d’affichage est dit « entrelacé », interlaced en anglais. D’où la dénomination 480i pour ce genre de signal.

Le défaut majeur de ce standard était la très mauvaise fidélité des couleurs avec les télévisions d’avant les années 1990. Ce problème était majoritairement causé par des composants de démodulation du signal dans les téléviseurs qui n’étaient pas vraiment au point. Cela lui a d’ailleurs valu le surnom Never Twice (the) Same Color (jamais deux fois la même couleur en fançais).

Le SECAM :

La France a eu son propre standard d’encodage d’image couleur pour la télévision, le bien nommé SECAM (SÉquentiel Couleur Avec Mémoire). Je ne vais pas trop entrer dans le détail ici, mais j’avais tout simplement envie de partager avec vous l’arrivée de la couleur sur la télévision française, présentée par des personnes qui ont eu le bon goût d’enfiler des costumes noirs et blancs pour l’occasion :

L’évocation de ce standard dans ce dossier n’est pas non plus un simple caprice chauvin. Il se trouve que cette exception française a contraint les constructeurs à proposer une sortie RGB sur leurs consoles (à partir de la génération SNES/Megadrive), et ainsi pouvoir commercialiser ces dernières en France. Avant l’avènement du numérique, le RGB était dans la majorité des cas le meilleur signal vidéo possible pour les consoles de jeu.

Le standard PAL :

Le PAL (Phase Alterning Line), comme son nom ne l’indique pas, est un standard d’encodage couleur qui s’effectue cette fois sur 625 lignes, à 50Hz. Il a été développé en Allemagne après le NTSC, en essayant de corriger les défauts de ce dernier (notamment les problèmes de fidélité des couleurs), et a commencé à être utilisé au début des années 1960. Comme pour le NTSC, l’affichage de l’image se fait en 2 fois. Et toujours de la même manière que le NTSC, environ 8% de la bande est utilisé pour la synchronisation, ce qui nous fait donc une image d’une résolution de 768×576 (le 576i), mieux que pour le NTSC donc.

Et en jeu, cela veut dire quoi ?

La première chose à noter, c’est que jusqu’à l’ère Playstation/Saturn/Nintendo 64, la très grande majorité des jeux étaient en 240p (ou 288p pour certains jeux PAL). C’est à dire que les consoles ne calculaient que les lignes paires et affichaient ces dernières à chaque cycle. Les images impaires quant à elles restaient noires, ce sont les fameuses scanlines chères au cœur des amateurs de retro-gaming les plus exigeants. Ce mode d’affichage en une seule fois s’appelle un affichage « progressif » (progressive en anglais). C’est la même chose que le fameux 1080p actuel (sauf que maintenant nous affichons sur toutes les lignes de l’écran au lieu d’une sur deux). Cela permet de faire tourner des jeux en 60 FPS (ou pas, ça dépend des jeux…). Ce n’est qu’avec l’arrivée de la 5e génération de consoles (N64, Staurn, PS1, …) que le 480i/576i a commencé à être réellement proposé (dans les menus des jeux la plupart du temps). Et ce n’était pas forcément une bonne chose. En effet, on a du coup une alternance lignes paires/impaires, du coup on a bien toutes les lignes de l’écran qui sont occupées, mais cela provoque un « scintillement » de l’image. Petit conseil: si vous avez le choix entre « quelque-chose »i et « quelque-chose »p, prenez toujours le p, peu importe les chiffres devant. Le p c’est bien.

Ensuite, les jeux étaient pour une grande majorité développés par des américains et des japonais, et les plus gros marchés étaient également les marchés nippons et américains. Fatalement, les jeux étaient développés en priorité pour le standard NTSC. Les jeux sortant en Europe était donc inexorablement des « portages » plus ou moins réussis de ces jeux. Outre les problème de localisation (traduction, adaptation à la culture des pays, etc…), se posaient donc les problème de la résolution et la vitesse du jeu.

Concernant la résolution, le NTSC est en 640×480, tandis que les téléviseurs PAL affichent du 768×576. 576 – 480 = 96 lignes de différence. L’image se retrouvait donc avec des barres noires en haut et en bas de l’écran.

Pour la vitesse de fonctionnement de la console, il y a 2 chose à prendre en compte. La musique, et les mouvements. Concernant la musique, la modification à faire n’était pas très compliquée. Je sais que Nintendo avait mis dans son cahier des charges d’ajuster la vitesse de la musique pour le marché PAL. Chez les concurrents, ce n’était pas forcément le cas (oui je parle de toi Sonic…).

Par contre pour la vitesse du jeu, c’est un peu plus compliqué… Cette dernière est en fait lié au nombre d’images par seconde. Il faut bien comprendre que la variable temporelle d’un jeu, c’est l’image. Une animation d’un personnage va durer tant d’images. Prenons un jeu qui tourne en 60 FPS. Admettons qu’une animation du personnage, un saut par exemple, se déroule en 60 images en NTSC. Donc le personnage mettra pour nous 1 seconde à faire son saut. Cependant, en PAL, cette animation durera aussi 60 images, mais ces images seront affichées en 1,2 secondes. L’animation est donc 20% plus longue en PAL ! C’est donc la raison pour laquelle les jeux sont plus lents dans la zone PAL que dans la zone NTSC. Voici un petit exemple d’un jeu qui cumule un peu tous les soucis de conversions d’un jeu NTSC vers un jeu PAL:

Ceci étant dit, pour être totalement juste, il est important de signaler que la console NTSC aura plus de boulot à faire pour tenir les 30 ou FPS que la console PAL qui elle ne devra n’en assurer que 25 ou 50. Il n’est donc pas rare d’avoir plus de ralentissements dans les jeux NTSC que dans les jeux PAL. Ceci est particulièrement vrai sur les jeux Nintendo 64. Par exemple, Donkey Kong 64 a tellement de ralentissements dans sa version NTSC qu’au final, Donkey se déplace quasiment à la même vitesse dans les versions PAL et NTSC ! Donc les versions PAL sont effectivement plus lentes, mais également plus stables dans certains cas.

Le cas du 50Hz optimisé :

Il existe des jeux, notamment à partir de l’époque Playstation/Nintendo 64/Saturn, qui ont été optimisés pour tourner sur système PAL. Ces optimisations pouvaient être de plusieurs natures.

L’une d’elles consistait à adapter la résolution du jeu pour qu’il tourne en plein écran. Cela offrait un confort visuel supplémentaire qui est toujours le bienvenu.

Les développeurs pouvaient aussi s’attaquer directement au nombre d’image par secondes. Cela pouvait être fait en supprimant certains éléments à afficher par la console (ennemis, effets spéciaux, …) ce qui faisait que le jeu allait plus vite, car la console traitait les informations plus rapidement. Certains développeurs ont carrément enlevé certaines étapes dans les animations des personnages. C’est le cas de Naughty Dog avec Jak & Daxter sur PS2. Les animations étaient donc moins détaillées, mais duraient moins longtemps. Cela dit, même avec tous ces sacrifices, très peu de jeux PAL optimisés pour le 50Hz tournent aussi vite que leurs homologues NTSC.

Le 60Hz sur le territoire PAL :

C’est véritablement Sega avec sa Dreamcast qui a commencé a ouvrir la voie aux jeux tournant en 60Hz sur le territoire PAL. Au lancement du jeu, on pouvait choisir si on voulait utiliser la version 60Hz ou la 50Hz. En effet, depuis la fin des années 1980, les télévisions vendues en Europe étaient quasiment toutes compatibles avec le standard NTSC 60Hz. La Game Cube, la Playstation 2 et la XBox ont suivi le mouvement, et l’Europe a donc connu les joies du 60Hz officiel. Cependant, certains éditeurs continuaient de proposer des jeux en 50Hz exclusif, et sans aucune optimisation (Final Fantasy X en est le parfait exemple). À l’inverse, certains jeux ne fonctionnaient qu’en 60Hz, comme Metroid Prime 2: Echoes sur Game Cube. Par la suite, les constructeurs ont arrêté de faire une séparation entre NTSC et PAL (pour le problème de la fréquence en tout cas…), les téléviseurs compatibles 60Hz s’étant vraiment démocratisés dans nos vertes contrées.

Le zonage :

Toute considération technique mise à part, un autre facteur est important dans le choix de sa console. Le zonage ! En effet, certains constructeurs, ou certains éditeurs ont tout simplement fait en sorte que certains jeux ne fonctionnent que dans une région spécifique. Il peut y avoir plusieurs raisons pour ça : des problèmes techniques (50/60Hz notamment), juridiques, gestion du marché, etc… Ainsi, le choix d’une console PAL, NTSC-US ou NTSC-J va parfois vous empêcher de jouer à certains jeux. Ainsi, si vous êtes un grand fan de RPG, une Super Nintendo PAL n’est clairement pas un choix judicieux. Il vaut mieux se renseigner sur la ludothèque d’une machine en fonction de sa zone.

Le zonage pouvait  être fait de plusieurs manières. La forme des cartouches pouvaient être différentes en fonction de la fréquence de la console (comme pour la Super Nintendo ou la Megadrive par exemple), ou à l’aide d’une puce greffée sur le circuit imprimé de la cartouche qui indiquait que le jeu devait être utilisé avec une console spécifique à une région, comme les puces CIC de chez Nintendo (Notez qu’il est possible d’échanger cette puce avec une puce d’un jeu de la région choisie, ou même avec une CIC Key, qui fera tourner le jeu sur toutes les consoles). Parfois c’était littéralement inscrit dans le code du jeu, et il pouvait même y avoir toutes ces protections en même temps! Ce sont les développeurs qui choisissent s’ils veulent zoner leur jeu ou non.

Dans certains cas, les développeurs n’ont pas pris la peine de zoner leur jeu, et parfois toutes les versions différentes sont inclues dans la cartouche, comme Streets of Rage qui permet même de changer la langue du jeu à la volée avec une console switchée.

Le zonage a commencé à vraiment disparaître à partir de la PS3 chez Sony, et la XBox One chez Microsoft (bien que quelques jeux de la 360 sont region free). Nintendo eux persistent dans la politique du zonage, même s’ils ont récemment déclaré qu’ils se penchaient sur la question (peut-être que la NX sera dézonée?).

Notez que pour plusieurs machines, il existe des adaptateurs pour faire passer les jeux qui ne correspondent pas à la zone de cette dernière (comme le AD29 de la SNES par exemple). Ces adaptateurs ne changeront cependant pas la fréquence à laquelle tourne le jeu, et ont toujours quelques soucis de compatibilité.

Vous trouverez une list  (non exhaustive) des consoles et leur zonage en cliquant sur ce lien

Les consoles switchées :

Lorsque les téléviseurs 60Hz ont commencé à arriver en Europe, certains ont eu l’idée de modifier leurs machines pour qu’elle fonctionnent aussi en 60Hz. On trouve ainsi maintenant des consoles PAL qui peuvent faire tourner les jeux en 60Hz. Concernant la Megadrive, la Super Nintendo, et la Saturn, je peux confirmer que cela fonctionne très bien, même s’il existe certaines incompatibilités (notamment les jeux optimisés 50Hz auront des soucis si vous forcez en plus le mode 60Hz). Il existe de nombreux tutoriels pour vous expliquer comment faire ces modifications. Si vous êtes aussi habile que moa avec un fer à souder, certaines personnes vous proposeront le service (parfois même gratuitement).

Il faut toutefois noter qu’une console PAL switchée ne sort pas du « vrai » 60Hz. Prenons une Megadrive japonaise. Sa fréquence est de 59,91Hz (donc très très proche du 60Hz). Une Megadrive PAL switchée fonctionnera en 59,31Hz, ce qui est plus loin des 60Hz. Globalement, une si faible différence ne se remarque pas trop à l’oeil nu. Ceci est vraiment problématique dans 2 cas de figure. Le premier, c’est si vous voulez utiliser un upscaler (XRGB-mini pour ne pas le citer). Ce dernier s’attend à avoir un signal très proche du 60Hz et va demander des réglages vraiment très précis pour que l’image ne fasse pas n’importe quoi. Le second cas, vous êtes un speedrunner d’un jeu très long, et cela va pénaliser votre temps par rapport à quelqu’un qui jouera sur une vraie console NTSC (on parle quand même de plusieurs minutes sur une run de Final Fantasy VI).

Et les consoles portables dans tout ça ?

L’avantage d’une console portable, c’est qu’elle n’utilise pas la télévision. Si si, je vous promets que c’est vrai ! Il n’y a donc pas de considération 50/60Hz, et pas de zonage non plus. Sauf Nintendo qui a décidé de zoner ses consoles portables à partir de la DSi. Mais pour les modèles précédents et les autres constructeurs, vous pouvez y aller sans soucis ! Il y a peut-être la PS Vita de Sony qui a une gestion des comptes PSN un peu problématique, mais, tout est gérable sans piratage. Il faudra juste faire attention aux chargeurs des consoles qui seront fournis pour fonctionner dans leurs régions respectives.

Du coup, NTSC ou PAL ?

Cette question n’a pas vraiment de réponse. Car ce n’est pas parce que le tourne plus lentement qu’il est mauvais. Personnellement j’étais très content de jouer à Mega Man X sur ma SNES PAL quand j’étais gamin. Si vous avez vos anciens jeux PAL, et que vous souhaitez juste racheter une console, il vaut peut-être mieux rester sur du PAL. Si vous voulez retrouver exactement les mêmes sensations que quand vous étiez plus jeunes, même constat. Et puis pourquoi pas essayer de faire switcher sa console afin d’avoir accès au catalogue US et Japonais, et voir ce que ça donne de jouer à vos jeux en 60Hz. Il existe également des adaptateurs pour faire passer des jeux NTSC sur console PAL, mais ces derniers n’offrent pas de compatibilité totale, et les jeux seront en 50Hz. Autre argument en faveur du PAL: votre magasin local aura beaucoup plus de choix en PAL qu’en NTSC, donc niveau approvisionnement de jeu, c’est plus simple.

D’un autre côté, si vous voulez jouer à tous les jeux de la manière dont ils ont été conçu, avec leur vitesse d’origine et tout ce qui va avec, le NTSC est clairement le seul choix possible. Si vous envisagez d’acheter un upscaler, cela vous évitera aussi quelques galères pour régler votre installation. À titre personnel, j’utilise un de ces gadgets, et j’ai donc commencé ma collection en achetant des consoles NTSC. Mais j’ai fait switcher mes consoles, ainsi, je peux jouer à tous les jeux peu importe leur origine, et en 60 Hz.

Dernier argument en faveur du NTSC : il faut bien reconnaître que la grande majorité des cas, un jeu Jap (ou dans une moindre mesure un jeu US) coûte moins cher qu’un jeu PAL (pour parler de ce que je connais, regardez les prix des Mega Man X sur eBay…)

Je dirais simplement pour conclure qu’il n’y a pas de mauvais choix. Un bon jeu est un bon jeu, qu’il soit en 50 ou en 60Hz. Vous savez maintenant tout ce qu’il faut sur le sujet, donc faites en fonction de vos goûts et de votre porte-monnaie. Et amusez-vous bien, bande de sales gamins !